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- Evolutions des modèles de compréhension des situations de handicap
Intervention de Marc Maudinet lors du 7ème Forum des Associations de la Courte Echelle, 6 avril 2011 Lyon sur le thème « De l’intégration à l’inclusion : quels changements pour l’élève ? »
Notions de handicap et d’inclusion
Afin d’aborder cette question dans toute sa dimension, il est nécessaire de positionner la question guide de ce forum dans un environnement plus large que la seule question de l’intégration et l’inclusion des enfants en situation de handicap.
C’est pourquoi j’aborderai successivement les questions liées à la notion de handicap et à celles de l’inclusion laissant le soin aux autres intervenants de préciser les dimensions spécifiques liées à ces questions dans le cadre des politiques publiques françaises.
La notion de handicap et son évolution : quelques repères
Il me faut préciser que l’utilisation du terme de « handicap » peut dans certaines situations prêter à confusion. Ce mot ayant dans certaines cultures et pratiques langagières des connotations péjoratives, négatives, voire même injurieuses. Il est par conséquent à utiliser avec précaution même si les mots « personne » et « situation » ont venus depuis essayer d’en atténuer la brutalité. Il n’est malheureusement pas si rare de voir encore aujourd’hui tant dans la presse ou dans les discours utilisés l’expression « l’handicap(é) ». L’élision étant la marque sémantique du rejet de l’autre.
La notion de handicap est avant tout le résultat d’une construction collective qui s’inscrit dans l’histoire même de l’humanité et de la diversité humaine. Le terme de « handicap » est d’une utilisation récente – Fin 19ème début 20ème siècle. A ces époques dans les représentations sociales, la pauverté va d’ordinaire avec la faiblesse. La notion de pauvre appelle la notion de faible. De la même façon la notion de handicap appelle celle d’incapable.
C’est au cours de la fin du 20ème siècle que va s’engager un travail de modification de ces représentations par la formulation, notamment, de nouveaux cadres et modèles de pensée. Nouveaux paradigmes diront certains que nous retrouvons dans les définitions qui sont produites dans le seconde partie du 20ème siècle.
Un rapide retour sur la construction de cette notion peut nous permettre d’en préciser ces liens avec l’univers du jeu.
Nouveaux modèles, nouveaux paradigmes
L’évolution du discours et des représentations sociales à la fin de cette période vient mettre en tension deux éléments d’une même réalité sur l’affirmation que les besoins des personnes handicapées ne se résument pas à des soins et à de la charité mais oblige à une lutte contre la ségrégation et les discriminations dont sont victimes les personnes.
Nous pouvons rendre compte de ces tensions en prenant l’image d’une médaille qui d’une côté affirme comme modèle d’action et de prise en charge des personnes handicapées individuelle et médicale que peuvent caractériser les fondements du secteur médico-social dans le contexte des lois de 1975.
La transformation de ces fondements s’effectue avec la Loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST 2009). Ce modèle affirme que les personnes handicapées sont avant tout des personnes qui n’ont pas l’usage de leurs membres, qu’elles doivent se déplacer en fauteuil ou encore qu’elles sont incapables d’apprendre, qu’elles ne sont pas capables de travailler ou encore qu’elles sont agressives et ont besoin d’une continuelle assistance.
Deux présupposés sous tendent ce modèle. Le premier : les enseignants de l’école « normale » ne peuvent prendre en charge les enfants handicapés du fait de leurs déficiences ; le second : les élèves handicapés ne sont pas capables de tenir le rythme scolaire des autres enfants et abaissent de ce fait l’efficience des apprentissages de la classe. Il est alors affirmé que les enfants en situation de handicap ont besoin d’être soutenus et aidés par des structures spécialisées.
De l’autre côté de cette médaille, nous trouvons le modèle dit social qui souligne que l’accessibilité des bâtiments, des transports et espaces sociaux est inadaptée et rend la cité inaccessible aux personnes. C’est pourquoi, les personnes handicapées ont peu de possibilité d’emploi et qu’ils sont dépendants des aides publiques. Ségrégués socialement, ils sont victimes de préjugés et d’attitudes sociales de rejet.
Il affirme l’idée dans ce modèle que la capacité ou l’incapacité d’une personne est largement tributaire de son environnement.
Cadre de référence et élaboration de politiques publiques
Les débats autour de ces questions aboutiront, à la fin du 20ème siècle, à la reformulation des politiques sociales en direction des personnes handicapées avec pour objectif global de protéger les droits et la dignité des personnes ayant à vivre des situations de handicap.
Fondée sur les droits de l’homme cette approche de l’inclusion/intégration des Personnes Handicapées s’effectue sous la forme de ce que recouvre aujourd’hui la notion de « Politique sociale intégrée ». Le modèle d’action politique fondé sur cette notion prend appui sur les droits de l’homme et considère que le handicap résulte de l’organisation des interactions entre individu et société.
Lorsqu’il est question des personnes en situation de handicap, les droits de l’homme sont à considérer non comme une idéologie mais comme principe d’action capable de configurer la réalité sociale.
Marc Maudinet
Co-directeur du Master « Gestion et politique du handicap » Sciences-po, Paris. Ancien directeur du Centre Technique d’Etudes et de Recherches sur les Handicaps et les Inadaptations (CTNERHI)
Site internet du collectif La Courte Echelle