Pair-aidance familiale professionnelle

Pair-aidance familiale professionnelle
02.09.2024 Réflexion sur Temps de lecture : 6 min

La pair-aidance est une entraide entre des personnes ayant des expériences similaires. La pair-aidance familiale est une entraide entre familles ayant un proche malade ou en situation de handicap. Elle peut être effectuée à titre bénévole ou professionnelle. Nous décrivons dans cet article un métier nouveau : pair-aidant familial professionnel.

L’équipe d’Enfant-différent.org propose une petite synthèse du congrès « Pair-aidance familiale professionnelle », qui s’est déroulé le 3 juin 2024 à Lyon, , co-porté par le Réseau Génopsy et iMIND!

Il s’agit d’un métier nouveau et attendu, au cœur du sujet du parcours de soins et d’accompagnement des personnes. Les intervenants soulignent que « la pair-aidance familiale professionnelle est l’un des leviers pour que l’aide aux aidants soit systématique et précoce ».

Une définition de la pair-aidance familiale

Un pair-aidant familial est une personne dont un membre de la famille est concerné par un trouble de santé mentale et/ou le handicap. De par son expérience et son savoir elle vient en accompagnement et en soutien d’autres familles.

A ce jour, la pair-aidance familiale est pratiquée de manière informelle ou formelle, dans les associations notamment. Elle peut être pratiquée de manière professionnelle, cela signifie que le pair-aidant familial est embauché au sein d’une équipe et rémunéré pour exercer ces fonctions.

Le centre iMIND définit ainsi le rôle des pairs-aidants familiaux :

Ils favorisent la compréhension, l’acceptation puis l’empowerment des familles d’usagers en santé mentale et troubles du neuro-développement. Leur vécu expérientiel permet des actions de prévention, de psychoéducation et de soins à destination des familles. Ils contribuent aussi à la modernisation des pratiques.

centre imind

Les objectifs du métier

Les familles sont les premières à constater des signes de détresse ou un développement inhabituel de leur enfant. Elles sont confrontées trop souvent au sentiment d’être jugées, isolées, d’intuitions relativisées. Elles expriment le besoin d’être entendues et reconnues, accueillies, informées, orientées, formées, associées à la prise en charge…

La rencontre avec un pair-aidant familial professionnel a pour visée d’améliorer le parcours des personnes malades, d’aider les familles et d’être médiateur et de fluidifier l’échange entre les familles et les professionnels.

Les objectifs et moyens sont multiples : rompre l’isolement, diffuser des ressources et des informations, écouter, aider à cerner les besoins, répondre aux questions, aider à la communication avec l’équipe soignante, orienter vers des ressources…

Un pair-aidant professionnel (PAF pro) ne remplace pas un soignant, il n’est pas un représentant des usagers, ni un psychologue, ni un modèle. Il ne donne pas son avis sur les traitements et les prises en charges.

Les impacts de la psycho éducation organisée par des pair-aidants familiaux commencent à être identifiés par des études d’évaluation des programmes. On constate notamment une amélioration du fonctionnement familial, de la connaissance de la maladie, des compétences parentales de coping (manière de réagir ou s’adapter pour faire face à des situations stressantes) ainsi qu’une diminution du sentiment d’isolement.  Elle agit sur la prévention des rechutes pour les usagers.

De plus, la présence d’un PAF améliore les interactions des familles avec les professionnels. Cela permet d’accélérer le processus d’alliance thérapeutique, d’ajuster le contenu du programme, de faciliter la diffusion et l’appropriation de certains messages, de libérer la parole et le partage, de renforcer le processus d’empowerment des familles.

Les soignants témoignent que cette approche renforce une vision plus globale de l’accompagnement des personnes, lutte contre les stéréotypes, renforce l’humilité, renforce la confiance dans les proches, permet de saisir les expériences importantes pour les familles.

Un pair-aidant pro au sein d’une équipe de soin permet une habituation à la prise en compte des proches. C’est aussi une reconnaissance des capacités des familles ainsi qu’une légitimation de leurs compétences.

Jennifer Borsellino, médiatrice santé-pair

Une professionnalisation en cours

« Depuis 2012 en France, en s’inspirant de modèles canadiens notamment, la pair–aidance en santé mentale se professionnalise, à travers l’expérimentation du CCOMS des Médiateurs de Santé Pair (MSP)»

https://centre-ressource-rehabilitation.org/pair-aidance

Le Diplôme Universitaire « Pair-aidance en santé mentale » est co-porté par le centre ressource de réhabilitation psychosociale et l’Université Lyon 1, sous la responsabilité du Dr Mélanie Dautrey et du Pr Caroline Demily.

Les personnes rémunérées pour exercer ces missions ne sont cependant pas encore reconnues par un statut professionnel, ni de référentiel métier. Les emplois avec une fiche de poste « pair-aidance familiale professionnelle » existent bel et bien.

Où trouver un pair-aidant familial professionnel ?

Un recensement des PAF pro est en cours. Un annuaire national est en cours de création au Centre iMIND. Le nombre de personnes formées augmentera dans les années à venir.

Ces personnes travaillent en association, en collectivité territoriale, à l’hôpital.

Si vous souhaitez prendre contact ou être accompagné par un pair-aidant familial, vous pouvez questionner le service hospitalier que vous fréquentez, le CMP ou tout autre service, et leur demander s’ils ont la possibilité de vous orienter vers un PAF pro.

La pair-aidance familiale peut être mise en œuvre dans des ateliers d’entraide ou des programmes en présentiel ou en ligne.  Certains programmes de psychoéducation sont pensés en co-animation par des professionnels/soignants et des pair-aidants familiaux (par exemple : BREF, Prospect, Connexions familiales…)

Les enjeux et perspectives à venir

Les points d’attention que l’on peut soulever et les enjeux pour les années à venir :

  • Comment écouter et satisfaire les besoins de familles ?
  • Comment mettre en lien les parties prenantes (professionnels, soignants, familles, personnes concernées) ?
  • Comment implanter la pair-aidance familiale dans les lieux et programmes de soins et d’accompagnement des familles tout en clarifiant les rôles et place de chacun ?
  • Comment développer des indicateurs et outils d’évaluation ?
  • Comment engager et développer la généralisation la pair-aidance familiale  ?
  • Comment mettre en lien pair-aidance familiale et la pair-aidance usager ?
  • Comment développer l’auto-soin, le soin avec les pairs… ?

Le Pre C. Demily soulève des leviers pour gagner en élan : fédérer l’effort de formation et de communication sur le plan national, généraliser la mise en place des postes de pair-aidant familial dans les services, créer un statut et un référentiel métier, étendre la recherche participative et l’évaluation, sortir la pair-aidance du champ de la médecine seule (par exemple l’appliquer au secteur de la justice et autres).

Remerciements

Merci au centre Imind et Réseau Génopsy et iMIND! pour l’organisation du congrès, aux intervenants listés sur le site iMIND.

et le DR Mélanie Dautrey pour la relecture de cet article.

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