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Face à l’annonce d’un retard de développement chez l’enfant, les membres d’une famille vont réagir de manière singulière en fonction de nombreux facteurs…
La connaissance ou non du handicap, la représentation de celui-ci, la capacité à faire face à l’adversité, le vécu des pertes antérieures, le moment de la vie familiale où l’annonce va être faite, etc. vont influencer les stratégies individuelles et familiales pour se protéger de la souffrance engendrée par la survenue du handicap.
Ainsi, certains parents vont minimiser la gravité du problème, ressentant de la colère face aux professionnels qui font état des difficultés de l’enfant. D’autres vont consulter de nombreux spécialistes, mettre en place des rééducations pour essayer de limiter, corriger la déficience au risque d’en oublier la relation affective à l’enfant. Les familles peuvent s’isoler, renforçant les frontières avec l’extérieur du système familial qui leur renvoie une image douloureuse. Il peut arriver que des parents soient dans l’incapacité d’accueillir l’enfant déficient, trop éloigné de l’enfant idéal. L’éventail des réactions est ainsi large et varié.
Pour accompagner au mieux les familles, il convient de considérer que leurs comportements (qui peuvent nous paraître, de l’extérieur, étranges ou inadaptés) permettent de mettre à distance la souffrance et de continuer à vivre malgré la difficulté. Elles ont donc un rôle primordial de défense et sont toujours nécessaires. Comprendre le sens à ces réactions s’avère plus aidant que de lutter contre elles.
Les familles possèdent leur propre temporalité et sont en perpétuel mouvement. L’adaptation face à la survenue du handicap d’un enfant va s’inscrire dans le temps, jamais sans aller-retour entre des organisations plus ou moins fonctionnelles, mais toujours en fonction des besoins du moment de la famille.
Du côté des familles
Les familles se réfèrent souvent à une rupture de parcours lorsque survient l’annonce du handicap de l’enfant. L’idée d’un avant et d’un après est prégnante, du moins un changement de cap est évoqué dans de nombreux témoignages et imagé de diverses manières:
- prendre l’avion et atterrir dans un pays qui n’était pas la destination initiale
- regarder un film dans lequel il y a un arrêt sur image avant reprise avec un scénario différent
- suivre une rivière dont le lit est subitement détourné:
Nous étions si confiants avant, nous envisagions, nous projetions, nous imaginions l’avenir de la même façon que nous regardions l’eau couler de sa source, persuadés qu’il n’y aurait ni sèchement ni barrage, sans même imaginer que le lit de cette rivière pouvait être dévié. L’annonce de cette drôle de nouvelle, le peu de temps qui nous est accordé pour la recevoir, nous autorise à dire que la vie n’est pas un long fleuve tranquille. L’évidence de la continuité des choses, cette sorte de bon sens qui nous porte à croire que, toujours, demain sera semblable à ce que l’on imagine, ne fonctionne plus pour nous…. .
(Olivier Raballand, témoignage paru dans Reliance N°26, pages 54 à 58)
C’est une projection dans l’avenir qui dans un premier temps n’est pas envisageable car tous les repères sont chamboulés. Il s’agit pour le parent de se remettre en action par rapport à une nouvelle qui fige le vécu pendant une période plus ou moins longue.
Mais la remise en action vers un avenir est possible et les parents qui ont enclenché cette démarche regrettent souvent le manque de reconnaissance de cette réalité par leur entourage. La famille est soupçonnée de rester figée dans sa douleur, ses affirmations d’une vie heureuse sont reçues avec suspicion. Or penser un nouvel avenir est certes difficile mais non utopique. Certains parents diront même que « l’épreuve » vécue leur a appris à mieux reconnaître tous les bonheurs de la vie.
Texte écrit par Claudine Lustig et Marion Griot
Association Une Souris Verte…